Chaque voyage en bus en Birmanie est une expédition, une aventure unique qui mérite bien que je lui dédie un post. Voici 5 règles qui résument mes 54 heures passées en bus en 3 semaines. Je pensais avoir fait le pire en Inde, je n’avais pas encore compris ce qui m’attendait en Birmanie.
Règle n°1 : En moyenne à 10km/heure tu rouleras
Quand je quitte la canicule de Yangon pour trouver la fraicheur de Kalaw. Le voyage commence par quelques heures sur l’autoroute. Celle-ci est quasi vide puisque la majorité des birmans n’a pas les moyens de s’acheter une voiture, ni une carte d’identité, sésame nécessaire à la pseudo libre circulation dans le pays. Seuls les bus et les voitures de luxe y circulent !
Le trajet commence bien et je me demande même comment on peut mettre 18h pour arriver à destination. Après quelques heures à rouler à un bon rythme (et quelques arrêts pour refroidir le moteur), nous quittons cette fameuse autoroute et je comprends enfin. Nous entamons la montée vers Kalaw sur une route de montagne. Celle-ci ressemble à une route communale française en beaucoup (beaucoup) moins bien entretenue, ça vous donne déjà une petite idée de l’état ! Mais on peut dire que celle-ci était bien entretenue comparée à celles que j’emprunterai pour aller à Mandalay et à Bagan qui seraient, elles, plus assimilées à des pistes qu’à des routes ! Mon record (tous pays confondus) aura été de mettre 14h30 pour faire 130 km.
Règle n°2 : Saoulée par des clips musicaux et des films birmans tu seras
En Birmanie Asie, on ne connait pas le silence dans les transports. Nous sommes loin, très loin des voitures ID zen de la SNCF. Dès le départ du bus, on branche la télévision. Ça commence toujours par des clips musicaux locaux. Pour vous décrire un peu le genre, ce serait un mélange d’Elsa/Glen Medeiros, David et Jonathan et Céline Dion, en plus mièvre (si si c’est possible), le tout sur un clip qui ressemblerait à un roman-photo de Nous Deux version film ! On rigole à la première chanson, et on pleure à la deuxième parce que le volume sonore est tellement fort qu’il n’est même pas question d’essayer de s’isoler en écoutant sa propre musique ! C’est fort parce que le volume est au maximum mais surtout parce qu’il y a une enceinte toutes les deux rangées de sièges, histoire que tout le monde entende bien ! Le confort n’est pas toujours de mise dans les bus birmans mais par contre la sono ne tombe jamais en panne !
Trois heures de route et un arrêt pipi-diner plus loin, fini les clips mièvres. Place au film birman. Bon ben là ce serait quelque chose qui ressemblerait au doux mélange d’Hélène et les garçons, des feux de l’amour et encore une fois d’un roman-photo de Nous Deux version film.
Vers 22 heures, soit environ 7 heures après le départ, extinction des feux et du son, place à la nuit… Ou pas !
Règle n°3 : Toute la nuit éveillée tu resteras
Tout au long de la route, le bus passe par des check-points où le chauffeur verse généralement une taxe de quelques Kyats, la monnaie locale. Parfois, ces sont des arrêts « contrôle d’identité ». En effet il m’est arrivé par deux fois de devoir présenter mon passeport dont une fois à minuit. Comment ça se passe ? Le bus s’arrête au milieu de la campagne et tout le monde descend ! Les touristes ont leur stand où 3 militaires les attendent. Un premier ouvre le passeport, un deuxième note le n° du passeport et du visa sur un cahier, un troisième ferme le passeport et le rend à son propriétaire. Quelle efficacité !
Les locaux eux passent aussi un check point où leur carte d’identité est vérifiée. Il faut savoir que pour pouvoir bouger dans le pays, chaque birman doit posséder cette fameuse petite carte rose. L’obtenir coûte la modique somme de 500$, somme qui file directement dans les caisses de la junte ! Autant vous dire que peu de birmans possède ce sésame.
Outre ces check points, j’ai aussi eu droit à une pause « toutlemondedortycomprislechauffeur ». En pleine nuit, tous les bus et camions se garent les uns derrière les autres et arrêtent les moteurs. Sur le principe c’est sympa sauf que, qui dit arrêt des moteurs, dit arrêt de la clim et ça c’est beaucoup mais alors beaucoup moins sympa quand il fait chaud et que le bus est bondé. Impossible de dormir dans un bus dont la chaleur passe en quelques minutes de 20°C à 50°C. Pourquoi cette pause ? Je n’ai toujours pas trouvé l’explication. Peut-être que le militaire du check point dormait 😉
Règle n°4 : En groupe et avant le petit déjeuner tes dents tu laveras
Après une nuit au sommeil saccadé, il y a généralement un arrêt vers 5h du matin. Pause toilette/pipi/petit-déjeuner. A la sortie du bus, nous avons droit à la distribution de lingettes, brosse à dent et dentifrice ! Cool ! Enfin je pensais cela « cool », jusqu’à ce que je vive une scène un peu lunaire. En effet, après la « pause pipi » pour tout le monde, c’est l’heure de passer à la « pause brossage de dents, ablutions et crachats » ! Lors du trajet Lac Inlé/Mandalay, nous étions un groupe de 3 bus. Environ 150 personnes qui se brossent les dents en plein air et crachent tout ce qu’ils ont à cracher, c’est un peu violent comme réveil pour mon petit corps d’occidentale ! Le plus drôle dans l’histoire, c’est qu’une fois la toilette terminée, tout le monde passe mécaniquement au bol de soupe de nouilles ! Cette séquence unique en son genre me vaut de larges fous rires à chaque fois que j’y repense ! Je me revois assise sur un petit parpaing, la tête embrumée après une nuit épique, à regarder les yeux grands ouverts cette centaine de personnes faire sa petite toilette matinale avec une intimité que je qualifierais… d’asiatique, c’est à dire aucune !
Règle n°5 : dans le gaz pour les 24h suivantes tu seras
Bon vous l’aurez compris, un voyage en bus de nuit est une expérience qui n’est pas de tout repos, surtout en Birmanie ! Généralement une sieste matinale s’impose suivie d’une journée très calme ! Ainsi à Mandalay puis à Bagan, j’ai eu besoin de me défouler à l’arrivée. Marcher ou faire du vélo avant de m’écrouler de fatigue le lendemain. Aucun courage pour faire quoique ce soit. La chaleur n’a certainement pas aidé : à mon arrivée, le Myanmar était sous la canicule.
Aparté : Un peu à l’image de notre canicule de l’été 2003, de nombreuses personnes âgées sont décédées dans les jours qui ont suivi mon arrivée ! Il faisait quand même entre 40 et 50° au soleil selon les endroits, avec un taux d’humidité frôlant les 90%. Comme la junte militaire est toujours « sympa », outre les coupures d’électricité très courantes, elle peut déclarer soudainement une journée « restriction d’eau ». C’est arrivé lorsque j’étais à Kalaw où chaque habitant était restreint à moins d’un litre d’eau par jour et par personne. Je n’étais concernée par cette restriction puisque j’avais les moyens d’acheter de l’eau en bouteille ! C’est vrai que déclarer une journée de restriction d’eau en pleine canicule est la meilleure des choses à faire ! En même temps ça se saurait si l’état birman prenait soin de ses sujets ! Fin de l’aparté.
Bref à tous ceux qui souhaitent se rendre en Birmanie, si cette expérience ne vous tente pas, vous avez aussi la possibilité de prendre le train, propriété de l’état qui roule à 15km/h et dont tous les bénéfices vont à la junte, ou de prendre des avions blacklistés… A vous de choisir mais franchement je recommande vivement l’aventure en bus qui, à elle seule, vaut son pesant d’or (et en Birmanie ce n’est pas peu dire).
7 commentaire
Je suis une habituée du voyages en bus et j’ai toujours des aventures extras à raconter, même en Angleterre ou aux USA, mais là c’est le pompom en effet!
Et dire que pour ton record, tu aurais eu plus vite fait à vélo!!!
Plus vite à vélo et plus vite à pieds aussi… Enfin sans mon sac à dos 🙂
Ca laisse rêveur avant mon trip au Myanmar -_- ! Je t’enverrai des petites videos souvenirs quand j’y serai passé histoire de te rappeler de bons souvenirs 🙂 (oui je sais je suis généreux 😛 )
Je pense qu’à coté de ca le pays vaut vraiment le coup,non ?
Merci de faire partager tout ca en tous cas 🙂
P.S : Reprends la route,ca me manque de plus te voir avancer,un deuxieme TDM ? 🙂
Le Myanmar vaut vraiment le coup… Un de mes coups de coeur de ce TDM !
Reprendre la route ? Oui c’est sûr… Bientôt j’espère. Un TDM ? Peut-être pas mais il y a plein d’autres trucs à faire… Je réfléchis !
Très drôle… et très juste!
Je viens juste de sortir du bus, quinze heures de bosses pour arriver au cambodge et réveil au doux son des crachats!
NowMadNow
Coucou Adeline ! J’ai beaucoup ri en te lisant :). J’ai très envie de partir 3 semaines, voire 1 mois en Birmanie, tu as un blog sur ton voyage ?
Merci Julie 🙂 je n’ai pas trop écrit sur la Birmanie, c’était pendant mon tour du monde en 2010 et à l’époque le pays était fermé, il n’y avait pas vraiment de connexion internet qui me permettait de publier. Tu trouveras quelques articles racontant des instantanés de voyage en suivant ce lien https://www.voyagesetc.fr/carnets-de-voyages/asie/birmanie/ mais je n’ai pas d’article détaillant mon parcours malheureusement.