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Au nord-ouest du Cambodge, non loin de la frontière thaïlandaise et à l’écart des sentiers touristiques balisés du pays, Banteay Chhmar abrite des temples qui ressemblent fortement à certains du site archéologique d’Angkor. J’ai passé trois jours dans ce village qui participe à programme de tourisme chez l’habitant intéressant. Récit de ce voyage au pays des sourires, des temples oubliés et du tourisme solidaire responsable.
Je quitte Siem Reap et les temples d’Angkor légèrement saoulée par la faune touristique. Pour la suite de mon voyage, je décide donc de me retirer du monde pour visiter un Cambodge un peu plus profond. C’est sur Banteay Chhmar que se porte mon choix.
Une aventure pour rejoindre Banteay Chhmar
Pour rejoindre le village, j’ai rendez-vous avec un taxi collectif à Sisophon. Je prends donc un bus à Siem Reap où, avant même mon départ, l’aventure commence. Le bus est en retard et je découvre assez vite qu’un grand nettoyage de printemps est en cours dans les rues de la ville et bloque donc la circulation.
Balayer, astiquer… Les rues de Siem Reap n’ont jamais été aussi belles. Une fois cette drôle de scène passée, je monte enfin dans le bus qui me mène à Sisophon où je retrouve monsieur Ponlok. Nous monterons à 7 plus les courses dans sa Toyota 5 places : 4 à l’avant, 3 à l’arrière. Les sacs et autres cartons attachés sur le coffre.
A mi-chemin, check-point… Monsieur Ponlok s’arrête et fait passer sa fille à l’arrière sur les genoux de sa maman. A l’origine, elle était assise à sa gauche sur le siège du conducteur.
C’est vrai que c’est mieux pour passer un barrage de police, non ?
Bien sûr on ne nous dira rien. Nous sommes en règle… Ou pas…
Ça passe, c’est le principal !
La jeune fille venue nous rejoindre à l’arrière de la voiture me pose quelques questions dans un français remarquable. Je suis d’abord étonnée et puis je me souviens que l’association française Les Enfants du Mekong est présente dans le village, pour soutenir des familles et parrainer des enfants. Des bases de français doivent être apprises à l’école. C’est chouette !
La vie simple d’un village…
Arrivée sur place je rejoins l’office du tourisme communautaire et le directeur m’emmène directement dans la famille où je vais loger. Ma chambre est située au-dessus d’un petit salon de coiffure. Ici il n’y a guère qu’un lit, une moustiquaire et un peu d’électricité. La simplicité que je suis venue trouver. Au rez-de-chaussée, il y a une douche à l’eau de pluie. L’eau courante n’existe pas dans le village.
Ma famille, un couple avec un bébé et une grand-mère, habite à deux pas du marché. J’ai loué un vélo pour me déplacer plus facilement dans les environs. Ces trois jours vont être chouettes.
La famille ne parle pas trop anglais, la communication n’est pas aisée mais avec de jolis sourires et des signes, tout est facile.
Après ma petite installation, je sors me balader en vélo. Au détour d’une rue, je suis interpelée par un groupe d’enfants qui souhaite m’emmener visiter le temple voisin. Petits, grands, le chien, ils m’accompagnent tous dans les ruines où il ne reste quasi rien. Au retour, les uns après les autres ils s’amusent à monter sur le porte bagages de mon vélo, ce qui entraine un fou rire général. Mon séjour commence bien.
Le village est construit autour du grand temple de Banteay Chhmar, lui-même situé sur une île. La route qui contourne les douves est en bitume mais le reste ne l’est pas, ce sont principalement des chemins de terre rouge.
Un peu comme partout au Cambodge, la population est assez jeune, un fait principalement dû à la guerre civile qui a décimé une partie de la population. D’ailleurs dans les environs de Banteay Chhmar se trouvent quelques anciens camps de travail de Pol Pot.
… Et un temple détruit mais sublime
Le temple est caché sur son île. De l’extérieur il ne laisse rien paraître et donc je ne sais pas trop à quoi m’attendre. Je pénètre dans les lieux, m’acquitte d’un droit d’entrée de 5$ et à moi l’exploration. Car c’est bien d’une exploration dont il s’agit. Construit au XIIème siècle sous l’ère de Jayavarman VII, le temple de Banteay Chhmar est aujourd’hui en ruine et bien envahi par la végétation.
Bien que assez détruit, on y trouve quand même de magnifiques bas-reliefs qui tiennent debout au milieu d’amas de pierres. De véritables trésors que l’on se lasse pas de contempler. Ils sont comparables à ceux d’Angkor Vat ou du Bayon. Parmi ces joyaux, on trouve ce mur avec ses ceux sculptures aux bras multiples, comme préservé au milieu de ruines. Ça et là des Apsaras, Nâgas et autres motifs bien typiques des temples de l’époque angkorienne. Visiblement ce temple est connu pour ses 2000 m2 de sculptures de scènes quotidiennes.
Je suis seule ce jour-là à explorer ces ruines et je me demande comment on peut laisser dépérir un temple aussi sublime et dignes de ceux d’Angkor. Heureusement il tient encore debout grâce au Global Heritage Fund qui oeuvre pour sa préservation. Cette association aide la communauté locale à prendre conscience du bijou qu’elle a entre les mains, à le chouchouter et à développer un tourisme responsable en espérant créer un peu de bruit autour de ces vieilles pierres.
Un jour peut-être il entrera sur la liste de l’Unesco. Il le mérite. Au moins pour être protégé.
Il y a 9 temples satellites autour de ce bijou. Au milieu des ruines, des têtes de Bouddha émergent, cerclées par des fils de fer. Soutenues par des étais de bois.
Du bricolage pour soutenir l’histoire et ne pas la laisser s’effondrer encore plus.
Banteay Chhmar : voyager autrement au Cambodge
Aller à Banteay Chhmar c’est avant tout vivre l’expérience d’une immersion totale dans la vie d’un village et aller à la rencontre des cambodgiens.
Certains vous diront que c’est une expérience authentique. Je déteste cette expression devenue galvaudée qui réduit, je trouve, l’expérience à un certain voyeurisme. Je préfère dire qu’aller à Banteay Chhmar, c’est vivre concrètement la vie d’un village assez retiré du monde et y partager simplement des instants de la vie de tous les jours.
Ici on vit au rythme du soleil, on se fait réveiller à 5h du mat par quelqu’un qui crie pendant une heure dans les haut-parleurs du village, on va au marché, on joue avec les enfants et au milieu de tout ça, on visite les temples dispersés dans les alentours. C’est simple et c’est la vie !
Les infrastructures touristiques à Banteay Chhmar n’ont rien à voir avec celles d’autres villes du Cambodge. Pas d’hôtel de luxe, pas d’hôtels tout court. Le tourisme est réservé à ceux qui souhaitent loger chez l’habitant, aider à faire vivre une communauté et à essayer de redonner ses lettres de noblesse à ce temple oublié.
Durant ces 3 jours à Banteay Chhmar, j’ai pris mon vélo et je suis allée me balader autour du village sans but précis. Juste celui de me promener. J’y ai vu la vie des champs, je me suis arrêtée au troquet du coin, j’ai observé la vie, joué avec les enfants, partagé des petits instants avec ma famille… J’ai beaucoup souri aussi… presqu’à m’en démantibuler la mâchoire !
Je voyage pour vivre des instants comme ceux-ci, loin du monde, avec des gens qui se respectent et essayent de se comprendre. C’est ça voyager !
Pour être très honnête, j’avais un peu perdu la foi envers le tourisme et ses bienfaits après mes 5 jours à Siem Reap. Je l’ai retrouvée rapidement à Banteay Chhmar. Le tourisme a du bon quand il est finalement fait de manière responsable et solidaire.
Visiter Banteay Chhmar : mes conseils pratiques
Le principe de l’office de tourisme communautaire
Le CBT (community-based tourism) centralise les réservations des personnes désireuses de faire un séjour à Banteay Chhmar. Grâce à cette structure, vous pouvez réserver un logement chez l’habitant, une visite de temple, une journée avec des villageois pour voir comment ils travaillent, visiter les soieries du Mékong, un diner… Bref l’offre est assez large pour permettre d’y rester au moins 3 jours sans s’y ennuyer. Ils sont soutenus par Heritage Watch et Global Heritage fund, deux associations qui se trouvent sur place.
Une partie des bénéfices de l’activité touristique va directement aux familles qui accueillent, aux guides, aux cuisiniers, le reste va à la communauté. Par exemple sur les 7$ par nuit que j’ai payés, 5$ vont à la famille, 2$ vont au centre communautaire pour développer de nouvelles structures, former les villageois à l’accueil, offrir des infrastructures à la communauté, rénover le temple, etc…
Comment réserver son séjour à Banteay Chhmar ?
Pour réserver son séjour à Banteay Chhmar, il suffit de contacter par email l’office du tourisme communautaire.
L’adresse mail est la suivante : info @ visitbanteaychhmar . org. J’ai reçu une réponse assez rapidement, je dirais moins de 24h après l’envoi du mail.
Leur site internet, Visit Banteay Chhmar, regroupe toutes les informations nécessaires sur le temple et les services proposés par le bureau.
Comment aller à Banteay Chhmar ?
Il n’y a pas de bus qui s’arrête à Banteay Chhmar. Pour rejoindre le village, il faut prendre un taxi, privatisé ou collectif, à Sisophon. Le bureau du CBT vous donnera le numéro de téléphone de Monsieur Ponlok, le taxi du village, lors de la réservation.
La ville de Sisophon est située sur la ligne qui relie Siem Reap à Battambang, vous trouverez donc facilement un bus qui vous déposera dans cette ville. Il faut compter environ 3 heures depuis Siem Reap et 2h depuis Battambang.
Il faut 1 à 2h pour faire le trajet de Sisophon à Banteay Chhmar. La route est goudronnée donc c’est assez facile.
Que faire à Banteay Chhmar ?
Le temple est certainement ce qui vous fera aller à Banteay Chhmar, les villageois seront ceux qui vous y feront rester. Vous pourrez :
- Visiter le temple et ses satellites
- Visiter les soieries du Mékong et acheter de belles écharpes (attention l’usine est fermée le week-end, mieux vaut prévoir un séjour en semaine pour les visiter)
- Vous balader dans le village et les campagnes alentours
- Participer à la vie des champs avec des villageois
- Jouer avec les enfants
- …
Avec ce récit, j’espère vous avoir donné l’envie de voyager autrement au Cambodge, d’essayer d’arrêter de courir pour voir mais plutôt d’essayer de vous poser pour vivre des instants de la vie de tous les jours. C’est ce que la communauté du village de Banteay Chhmar propose avec sa structure de tourisme communautaire.
Si vous vous décidez à y aller après la lecture de cet article, venez partager en commentaires à votre retour tous ces petits instants suspendus que vous aurez vécus. Et si vous y êtes déjà allés, dites-moi ce que vous avez aimé dans cette expérience.
Merci 🙂
Pour aller plus loin sur le Cambodge
Je suis allée au Cambodge en avril 2018. J’y ai passé 3 semaines, de Siem Reap à Phnom Penh. Vous trouverez ci-dessous un lien vers mes articles et notamment le guide pratique.
9 commentaire
Ton article est très intéressant, j’ai visité Angkor mais pas Banteay Chhmar, ça donne très envie. Je ressens souvent cette impression de voyeurisme dont tu parles quand je découvre la vie d’une communauté, en voyage, donc je trouve ça super le concept d’office de tourisme communautaire.
Les paysages sont magnifiques, merci pour cette belle découverte !
Merci pour ce très bel article et tes sublimes photos.
Sublime! Banteay Chhmar est le lieu à visiter au Cambodge. En prenant le temps de les connaitre et de parler avec eux; ce sont les villageois les meilleurs guides pour visiter le temple!
L’article est top et très bien détaillé ! C’est une belle présentation de Banteay Chhmar qui, en effet, est une alternative à l’agitation touristique d’Angkor.
Bon prochains voyages ! 🙂
Merci Carnets d’Asie. Banteay Chhmar a été un vrai coup de coeur au Cambodge. Ceci dit, c’était peut-être facile de tomber sous le charme après Angkor !
Bon comme tout le monde, je rêve d’aller à Angkor, mais oui…comme tu dis, c’est bondé. Et ce site est juste magnifique, une belle alternative.
Merci pour ton chouette article qui nous a beaucoup inspiré dans l’organisation de notre voyage (celui sur Kampot aussi)
Je t’écris depuis Banteay Chhmar ou nous séjournons depuis 2 jours, et où on vit toutes ces petites scènes simples que tu décris.
Merci !
Merci Marine, Profite bien de ton séjour